All I want for Christmas ~ [Agnes]

Agnes est assise par terre depuis quelques minutes, à présent. Elle n’a sincèrement plus envie de se relever. Elle n’avait fait que quelques pas dans le gymnase avant de se faire violemment bousculer par un inconnu – mais ça, encore, allait. Après être pathétiquement tombée elle s’est relevée, a regardé autour d’elle et s’est aperçue que la personne en question s’en était déjà allée, et a décidé de reprendre son chemin sans s’en faire plus que ça. Elle est, après tout, habituée à ce type d’accidents… et ce n’est pas sans raison, puisque deux minutes plus tard, alors qu’elle réfléchissait à la situation dans laquelle aller pour trouver son Secret Santa, une autre personne l’a poussée encore, la jetant cette fois-ci violemment au sol, de telle manière qu’elle est tombée sur le côté, et s’est cogné la tempe contre le sol du gymnase.
Elle devrait écrire un livre expliquant en détails quels sols sont les plus douloureux à la chute, personne ne le ferait mieux qu’elle ; les sols de gymnases, en l’occurrence, sont loin d’être les pires, mais le choc a été si violent qu’elle reste assommée quelques secondes. Elle entend quelqu’un vaguement marmonner des excuses et voit sa forme s’en aller aussi vite – elle suppose que c’est son agresseur accidentel, et qu’elle ne le reverra pas de sitôt.
Elle se relève aussi vite qu’elle le puisse, afin de ne pas rester allongée par terre ainsi, bien qu’elle ait encore un petit peu la tête qui tourne. Elle se sent moins gênée, cependant, de rester assise quelques minutes pour retrouver ses esprits, et c’est ce qu’elle fait – puis elle cligne plusieurs fois des yeux pour observer correctement ce qui l’entoure. Elle ne voit que des jambes, quelques paires de fesses, et si personne ne lui vient en aide, au moins, personne ne lui marche dessus non-plus.
« C’est déjà ça… »
Aujourd’hui, Agnes essaie de ne pas trop désespérer pour pas grand-chose ; elle tient à ce que la remise des cadeaux soit au moins un minimum festive, et qui dit festif, dit joyeux. Elle se persuade que si elle ne fait pas attention à ces bousculades, elle pourra continuer sa journée normalement comme si de rien n’était.
Elle se prépare d’ailleurs à se relever, mais pour cela, il lui faut s’assurer d’avoir toutes ses affaires avec elle. Elle tend le bras vers son sac à main qu’elle aperçoit au sol, à sa gauche, et c’est à ce moment-là qu’elle réalise qu’il s’est renversé, ouvert, et que toutes ses affaires se sont étalées par terre.
Elle serre les dents et grimace mais se retient de trop clairement réagir en se mettant à quatre pattes pour rapatrier tout ce qu’elle voit. Il y a un miroir de poche qui heureusement n’est pas cassé, sa petite pochette d’affaires de premiers secours, deux serviettes hygiéniques qu’elle emmène toujours au cas où, et quelques pièces de monnaie. Elle enfonce rapidement tout cela dans son sac et se rassoit à genoux pour vérifier que tout y est ; et elle y trouve bien toutes ses affaires personnelles, mais il manque quelque chose d’extrêmement important : son cadeau.
Elle remue le contenu du sac dans tous les sens, il n’est pourtant pas bien plein ! Mais elle ne trouve pas sa petite boite dans un emballage coloré qu’elle est sûre et certaine d’avoir emmené en sortant de chez elle, ayant vérifié deux fois avant de partir, et trois fois après. Elle panique en cherchant, les larmes aux yeux mais se retenant de parler, elle fouille toutes les poches possibles et imaginables et ne trouve toujours pas. Quand elle regarde tout autour d’elle, elle ne trouve strictement rien par terre – elle a beau remuer dans tous les sens, rien ne ressemblant à son cadeau n’est plus dans les parages.
La voilà assise par terre, à présent, désespérée. Elle ravale ses larmes et se mouche avec un kleenex qui était bel et bien dans son sac à main, lui. Elle ne sait pas quoi faire…
Le Secret Santa de la jeune femme est Tifani Stanley, l’Ultimate Flirt. N’ayant eu que vingt-quatre heures pour le trouver, elle n’est pas sûre d’avoir acheté un super cadeau, mais elle a quand même pensé que l’attention pourrait plaire ; elle lui a acheté un rouge à lèvres couleur cerise, se disant que si elle n’en porte pas d’habitude c’est qu’elle n’en a pas, et qu’elle pourrait y trouver du charme pour des occasions, d’autant plus qu’elle est sûre qu’il lui irait très bien. Mais maintenant elle l’a perdu, elle ne l’a plus, et elle ne sait pas quoi faire.
« C’est fini, E.V.E. va me tuer… », pense-t-elle en se relevant d’un seul coup, presque que comme un zombie.
Elle fixe le vide face à elle, à court d’espoir et d’idées. Elle a trop peur maintenant de croiser Tifani, et de ce que l’intelligence artificielle va lui faire quand elle apprendra que celle-ci n’a pas reçu de cadeau. Elle est comme paralysée par sa peur et sa tristesse, et elle ne voit pas qu’une certaine personne s’approche d’elle, jusqu’à ce qu’elle soit juste devant elle. Agnes cligne des yeux.
« Devine qui a un cadeau pour toi! » dit-elle.
C’est Tifani.
L’Ultimate Victime ouvre grand les yeux et la bouche, prise par surprise. Ses pensées s’entremêlent dans son esprit, et elle se sent à nouveau paniquer. Elle n’assimile même pas tout à fait ce qu’elle vient de lui dire – c’est Tifani, à qui elle doit un cadeau, et pour qui elle n’a pas de cadeau, oh mon Dieu, elle est tellement désolée !
« Je… Je n-ne sais pas… », répond-t-elle en cafouillant, pour ne pas laisser son interlocutrice parler dans le vide.
Mais elle ne sait même pas ce qu’il se passe. Elle a de nouveaux les larmes aux yeux, elle cherche une nouvelle fois du regard le paquet, ou même tout simplement le rouge à lèvre seul car qui sait ? par terre, mais ça ne sert à rien, et elle sent son cœur se serrer. Non seulement elle va décevoir Tifani, mais en plus elle risque de se faire tuer…
Elle met ses deux mains devant ses yeux, comme pour ne plus voir le monde autour d’elle.
« C’est une catastrophe… » chuchote-t-elle presque, sentant sa gorge se bloquer.